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Dans un monde plein de fausses idoles, soyez des héros

Dans une civilisation dans laquelle Dieu est mort, et qui libérée de sa tutelle ne sait que faire de sa liberté et cherche désespérément et en toute chose un nouveau joug à porter pour fuir le tragique et la souffrance qui accompagnent la liberté autant qu’une condition humaine soumise à l’entropie, la vraie figure de l’antihéros, est paradoxalement peut-être précisément l’antique héros.

Si nous dépouillons le héros de sa dimension céleste, alors nous retrouvons un être humain. Et si nous le défaisons de sa dimension terrestre, alors, nous voici devant Dieu. Mais c’est dans le héros, et dans le héros seul que nous retrouvons l’intersection de la terre et du ciel.

Avant tout, il y a d’abord l’humain, un être terrestre, de chair et de sang, peinant à s’extraire de la boue à laquelle il reviendra après un bref instant. Puis il y a les grands mythes héroïques indo-européens, dont les plus anciens sont des variantes du mythe grec d’Hercule. Gilgamesh à Sumer, Rama en Inde. Puis le héros grec, épique, puis tragique puis dramatique. Et par la Grèce se fait l’ascension vers le divin. La Grèce est la civilisation qui fait du héros une figure centrale, la civilisation grecque toute entière est civilisation héroïque. Et qu’est-ce que le héros grec sinon le chemin humain vers le divin. Et cet héritage s’est conservé de la Grèce antique aux néoplatoniciens, et par une acclimatation, dans le christianisme.

Mais si le héros est le chemin vers le divin pour l’humain, c’est aussi le chemin vers l’humain pour le divin. Car au travers du héros, Dieu peut saisir, comprendre, sentir ce qui normalement lui est forclos, comme par exemple la souffrance. D’où la notion selon laquelle les âmes des héros sont les larmes des Dieux. Alors que Dieu est serein, dépassionné, éternel, et que rien ne peut le troubler, l’homme est passionné, souffre, est tourmenté, malheureux, et fait l’expérience de la perte, de la chute, de l’humiliation, de la faiblesse, et du doute. Dieu ne connaitra jamais la passion, la douleur, ni la perte, et il ne pourra jamais véritablement saisir la nature humaine, sauf à en faire l’expérience au travers de son fils ou sa fille, et du cauchemar, de l’horreur, de la déchéance, des privations et des tourments inhérents de toute éternité à la Nature Humaine auxquels ils seront confrontés. Un Dieu n’est pas intéressé par des hommes prospères, heureux, et comblés. Que représentent leurs achèvements au regard des siens. Mais la douleur, la souffrance, la déchéance, toutes conditions qu’il ne connaîtra jamais, voilà qui retient son attention.

Et malgré tout, l’Homme, la souffrance, les tourments, la lutte face à la destinée, tout ceci demeure une énigme indéchiffrable pour Dieu.

Une énigme qu’il peut tenter de résoudre en transcendant sa propre transcendance, sa propre sérénité, sa propre félicité, c’est-à-dire en acceptant de faire l’expérience de la souffrance (πάθος) et de l’affliction. Et cette expérience lui est accessible par l’entremise du héros. C’est le héros qui permet au Dieu de ressentir la souffrance, et aux humains d’avoir un aperçu de la félicité, de la grandeur, de l’immortalité, et de la gloire.

De ce fait l’héroïsme est un paradigme ontologique autant qu’anthropologique, une ligne de crête, une échelle de Jacob sur la verticale de laquelle se joue le dialogue de l’humain et du divin, du terrestre et du céleste.

Mais là où il y a un héros, il y a toujours une tragédie. Le héros porte en lui la souffrance, la douleur, la perte, et le tragique. Un héros toujours heureux, satisfait, un héros comblé par la Fortune, n’existe tout simplement pas. Le héros est nécessairement malheureux, torturé et infortuné.

Pourquoi en est-il ainsi? Parce que se trouver à l’épicentre de la rencontre entre l’éternel et le temporel, entre la félicité et la souffrance, entre le ciel et la terre, est l’expérience la plus intolérable qui puisse exister pour un homme, un état que l’on ne souhaiterait pas, même à son pire ennemi.

Dans la chrétienté, à côté de quelques saints comme Saint-Michel ou Saint-Georges, la place du héros s’est vue prendre par les ascètes, les martyrs, et les saints. Et c’est une vérité qu’il n’existe pas d’ascète, de martyr, ni de saint heureux. Tous sont profondément torturés, tous sont confrontés à leur propre souffrance, et à la souffrance qui naît de la souffrance des autres. Pourtant, selon une autre lecture, une lecture céleste, ils sont tous bénis, et tous accèdent à la béatitude. En tant que tels, ce sont les pauvres d’esprit, ceux qui souffrent, ceux qui ont faim et soif de Justice. Les infortunés bénis du sermon sur la montagne.

Tout humain devient un héros par une pensée qui l’aspire vers le ciel, mais se heurte aux contingences terrestres. Ce sont les souffrances et l’infortune qui toujours les déchirent, les torturent et les tempèrent qui font d’un homme ou d’une femme, n’importe lesquels, des héros. Car toute vraie lutte est toujours d’abord et avant tout spirituelle. Rimbaud ne s’y trompait pas lorsqu’il écrivait dans une saison en enfer que le combat spirituel est aussi brutal que la bataille d’hommes.

Proclus, le grand néoplatonicien, disait qu’un héros équivaut à une centaine, ou même un millier d’âmes ordinaires. Si l’âme du héros est plus grande que l’âme humaine, c’est parce qu’au travers de sa souffrance et de son exemple il appelle chaque homme à la verticalité, à l’élévation, à la grandeur. Il appelle à soutenir la souffrance, à dépasser la condition humaine. Voici là la dimension héroïque qui donna naissance au théâtre des origines, et ce qui constitue le socle de l’éthique civilisationnelle européenne, et française en particulier. Ce socle qu’il paraît important, dans ces temps de confusion, de ne pas perdre, mais au contraire de chérir et nourrir en nous et chez les autres.

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La tâche des éveillés de ce siècle est d’accepter de connaître la souffrance et le malheur profondément, absolument, et pleinement. D’accepter la voie de l’héroïsme.

Aussi effrayant que cela puisse paraître, aussi paradoxal que ce soit, le salut est à ce prix.

Cet article comporte 1 commentaire

  1. Merci !!!
    Accueillir sans scepticisme la part de souveraineté spirituelle que tous avons reçue pour accomplir cette tâche, et servir de relais…. Dieu dit à chacun avant de le créer « Grandis derrière les choses comme un incendie, afin que toujours leurs ombres déployées entièrement me recouvrent. » (Du livre de la vie Monastique de R.M Rilke)

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